Syndicalisme ou Corporatisme?

Quel modèle pour nos associations étudiantes ?

Historiquement, deux modèles d’association étudiante semblent se dégager au niveau national. Une pratique qui semble liée au syndicalisme étudiant et qui conçoit les associations étudiantes comme des organisations politiques et un modèle corporatiste qui les conçoit comme des groupes d’intérêt. En tant qu’étudiants nous nous devons de chercher le meilleur modèle afin de l’adopter et de l’appliquer.

Premièrement, le syndicalisme étudiant se fonde sur le principe de démocratie directe. L’autorité suprême de d’un association syndicale étudiante c’est son congrès (au niveau national) ou son assemblée générale (au niveau local), c’est-à-dire le regroupement de ses associations ou de ses membres. En congrès ou en AS, les propositions peuvent émaner directement de n’importe quelle association ou membre et peuvent être amendées par n’importe qui. Chez les corporatistes en revanche (comme l’UEQ-FEUQ par exemple), l’instance suprême n’est pas le congrès, mais plutôt l’exécutif. Il n’existe parfois même pas d’assemblée générale (comme pour la FAÉCUM ou tout se déroule en conseil central). De plus, les congrès ou AG (lorsqu’ils existent) sont souvent structurés sur la base du principe de double majorité et non pas de démocratie directe. La double majorité fait en sorte que tout mandat requiert 2/3 des voix pour être adopté. Ce qui permet à 1/3 des associations ou membres de bloquer une proposition de grève par exemple. On exige aussi parfois deux types de votes différents (par exemple un vote de la base et une confirmation de l’exécutif). De plus, dans le cadre d’un congrès, aucune décision peut émaner du plancher, c’est-à-dire des associations. Toutes les propositions émanent uniquement de l’exécutif et de ses commissions spéciales, et ne peuvent être amendées par les associations, qui ne peuvent que les entériner, ce qui est antidémocratique. Aujourd’hui, l’UEQ et la FECQ par exemple, conservent ce principe de double majorité qui favorise le statu quo. L’UEQ a toutefois retiré la totalité de ses pouvoirs au congrès qui n’a plus que le pouvoir de conseiller l’exécutif (de faire des recommandations).

Dans une association de type syndicale les mandats en plus de provenir de la base étudiante sont aussi impératifs, ce qui veut dire qu’on ne peut pas s’y soustraire. Les exécutants agissent sur la base des mandats clairs de leur congrès ou AG qu’ils se doivent de respecter, car ils sont en tout temps révocables par le congrès. Dans une association corporatiste en revanche, les exécutants ne sont pas tenus d’avoir un mandat clair pour agir. Leurs mandats ne sont pas impératifs, mais représentatifs, c’est-à-dire qu’ils parlent en leur nom propre au nom de l’association qu’ils président selon leur volonté. Ils peuvent agir par initiative personnelle, et ce à l’encontre des revendications du congrès ou de l’AD. De plus, leurs mandats sont fixes et les exécutants ne sont pas révocables.

À cela s’ajoute la bureaucratisation notoire des association corporatistes. Les membres des instances dirigeantes d’une association syndicale sont composés de bénévoles, qui sont tous élus. Dans une association bureaucratique par contre, il n’y a qu’un nombre restreint d’élus parmi l’exécutif, le gros de l’exécutif est formé de permanents et d’employés salariés qui ne sont pas élus et n’ont pas de comptes à rendre à la base. L’UEQ par exemple n’élit que cinq de ces exécutants, le reste des tâches est confié à une série de permanents, nommés et non pas élus. De plus exécutants et permanents sont tous salariés, le budget de l’UEQ étant en grande partie composé de salaires. Cela entraîne des logiques bureaucratiques où les dirigeants de l’UEQ tentent de fédérer de nombreuses associations (ex. : la tentative d’affiliation de la CADEUL à l’Université Laval, après que celle-ci ait déjà dit non), pas tant pour les représenter que pour leurs prendre leurs cotisations afin de couvrir leurs salaires. C’est aussi pour cela qu’on voit la FECQ poursuivre nombre de ses associations membres ou faire de l’intimidation pour obtenir leurs cotisations (Par exemple l’AGECEM à Longueuil).

Mais les corporatistes divergent aussi des syndicalistes au niveau de la tactique. Les syndicalistes prônent un syndicalisme de combat (comme l’ASSÉ par exemple). Le but du syndicalisme de combat est d’établir un rapport de force avec le gouvernement, dans le but de contraindre celui-ci à adopter des revendications qui sont considérées comme fondamentalement justes. Ici le but n’est pas de convaincre le gouvernement, mais de le forcer à adopter nos positions. Pour contraindre le gouvernement, il faut un contrepoids à ses intentions. Par exemple si le gouvernement veut augmenter les frais de scolarité, il faut lui opposer la grève, des manifestations, des perturbations économiques, pour le contraindre à reculer. Ce contrepoids constitué des moyens de pression (grève, manifestations, blocages, sabotage, etc.) permet d’inverser le rapport de force en faveur du mouvement social contre l’intérêt de l’État, afin de faire triompher ses revendications justes. Si ce rapport de force est justifié, c’est parce que le syndicalisme de combat ne considère pas l’État comme un interlocuteur valable, ou neutre, mais comme ayant ses propres intérêts. Dans le secteur privé, cette stratégie est appliquée contre la classe patronale (la bourgeoisie), par la classe ouvrière (le prolétariat). Dans le secteur public, on considère que l’État appartient à la même classe c’est-à-dire qu’il s’agit d’un État bourgeois. C’est pourquoi le syndicalisme de combat se nomme aussi syndicalisme de lutte dans le mouvement ouvrier, parce qu’il prône la lutte des classes par opposition à la collaboration de classe.

Le modèle prônant la collaboration de classe est le syndicalisme réformiste, ou le concertationisme, dans le cas d’un syndicat étudiant, puisqu’il n’y a pas à proprement parler de rapport de classe. Néanmoins dans ce modèle on ne considère pas l’État comme capitaliste par essence, mais comme un interlocuteur neutre et valable. C’est le modèle de syndicalisme de l’UEQ et de la FECQ, qui est 100% corporatiste. Le but ici n’est plus de créer un rapport de force pour faire plier l’adversaire, mais de trouver un compromis avec lui. C’est pour cela par exemple qu’on voit un fort recul des droits des étudiants durant la période 1990-2005, puisque les compromis des fédérations entraînent bien souvent des reculs. C’est aussi pour cela qu’on a vu la FECQ-FEUQ tenter de trouver un compromis comme un meilleur étalement de la hausse avec le gouvernement Charest en 2012. Le concertationisme amène aussi l’UEQ à agir comme un groupe d’intérêt et à faire du lobbyisme.

Les corporatistes divergent aussi des corporatistes au niveau de ses positions. L’UEQ est par exemple pour l’indexation des frais de scolarité, là où l’ASSÉ est pour la gratuité scolaire. C’est parce que le modèle corporatiste (incarné par l’UEQ) est le modèle des fractions bourgeoises et surtout petites bourgeoises du milieu étudiant. Ce modèle correspond donc aux positions et aux tactiques de la petite bourgeoisie. Par exemple la petite bourgeoisie ne s’oppose pas directement à l’État bourgeois (comme le souligne Lénine dans l’État et la Révolution) et peu très bien se permettre financièrement une indexation des frais de scolarité. En revanche le syndicalisme étudiant représente les fractions prolétariennes et prolétarisées du mouvement étudiant qui entrent directement en lutte contre l’État bourgeois et que les hausses de frais (offensives de la bourgeoisie) visent directement à exclure. De plus, les corporatistes bornent toutes ses revendications aux intérêts purement académiques. Les syndicalistes étudiants en revanche font preuve de solidarité syndicale, et appuient des luttes sociales, politiques, féministes, écologiques, antiracistes, anti-impérialistes, etc.

Enfin les associations corporatistes sont souvent des ramassis de carriéristes carriériste, ses exécutants cherchent souvent à développer un réseau de contacts pour leur plan de carrière. Les postes d’exécutants sont souvent aussi utilisés comme des tremplins pour des carrières politiques. Pensons par exemple à Léo Bureau Blouin (FECQ) et Martine Desjardins (FEUQ), qui utilisèrent leur rôle pour leur carrière politique de député et de journaliste. Car l’UEQ a aussi la fâcheuse réputation d’être noyauté par le parti québécois et de servir un programme politique indépendant des intérêts des étudiants. Les syndicalistes au contraire conserve un principe d’autonomie face aux partis bourgeois (principe qu’a fâcheusement trahit un Gabriel Nadeau-Dubois en rejoignait Québec Solidaire).

Il est donc clair que ce sont les principes de démocratie directe et de syndicalisme de combat qui forment la base du syndicalisme étudiant sont les meilleurs principes pour obtenir des gains. C’est le syndicalisme de combat qui nous a permis de stopper l’offensive bourgeoise et réactionnaire du Parti Libéral en 2012 avec sa hausse démesurée de frais de scolarité. Ce sont les principes qui défendent le mieux les fractions prolétarienne et prolétarisées du milieu étudiant, et c’est pourquoi nous devons nous approprier ces principes théoriques pour les appliquer dans la pratique. Les Étudiant.e.s Socialistes sont là pour défendre ces principes, ils soutiennent le syndicalisme de combat et la démocratie directe et mèneront toujours une lutte acharnés aux corporatistes et à leur tactiques opportunistes de collaboration et de trahison.

Vive le syndicalisme de combat et vive la démocratie directe!

Rejoignez les Étudiant.e.s Socialistes et ensemble servons nous de ces armes pour lutter contre le capitalisme et la bourgeoisie!

ASC

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